En 1973, l'Angers SCO de Jean-Marc Guillou terrasse le géant stéphanois 4-0 lors de la cinquième journée de championnat. Un match marqué par l'avènement d'un jeune attaquant auteur d'un quadruplé : Marc Berdoll.

Un vent de changement
A l’été 1973, le football français est à un tournant de son histoire. Après quatre années de mandat, Georges Boulogne, le sélectionneur des Bleus, laisse son poste après un nouvel échec dans la course à la qualification pour la Coupe du Monde 1974. Comme en 1970, l’équipe de France regardera de loin les meilleures équipes se disputer le titre mondial en Allemagne l’été suivant. Pour remplacer Boulogne, la Fédération Française de Football décide de tenter un pari audacieux. Pas franchement convaincue par les différents candidats français, elle approche le roumain Stefan Kovacs, successeur de Rinus Michels à l’Ajax et double vainqueur de la Coupe d’Europe des Clubs Champions en 1972 et 1973. Après un été de tergiversations et de négociations avec la fédération roumaine qui souhaitait également Kovacs pour prendre la tête de sa sélection, l’ancien entraîneur de l’Ajax devient officiellement le nouveau sélectionneur des Bleus le 23 août 1973. Apôtre du football total de Rinus Michels, Kovacs doit symboliser le renouveau d’une équipe de France depuis longtemps décriée pour son style de jeu trop défensif. Dès le 24 août 1973, l’ex-entraîneur de Johan Cruyff à l’Ajax se met au travail en se rendant à Angers afin d’y observer l’AS Saint – Étienne, champion en titre qui se déplace sur la pelouse du SCO. En effet, en tant que plus grande équipe française du moment, les Verts possèdent plusieurs internationaux tels que Georges Bereta, Jean-Michel Larqué ou encore Hervé Revelli. Kovacs ne le sait pas encore mais le joueur qui va lui taper dans l’oeil ce jour-là ne porte pas de maillot vert et est encore quasiment inconnu du grand public…
La démonstration de Marc Berdoll
Lorsqu’il pénètre sur la pelouse en ce soir du 24 août 1973, Marc Berdoll n’est encore qu’un jeune joueur prometteur d’une bonne équipe de D1. Lancé dans le grand bain en 1970 à seulement 17 ans, il a participé aux excellentes saisons du SCO depuis le début de la décennie 70 (4ème en 1971-1972, 5ème en 1972-1973). Toutefois, avec 4 buts au mieux en 1972-1973, le jeune attaquant angevin n’est encore qu’une promesse au milieu de joueurs confirmés comme Eric Edwige, Yvan Roy ou le génial meneur de jeu Jean-Marc Guillou. Du haut de son mètre 71, c’est peu dire qu’il n’a pas du donner de sueurs froides la veille de la rencontre au redoutable défenseur central stéphanois Oswaldo Piazza, une référence à son poste. Pourtant, dès la 3ème minute, le petit Berdoll parvient à s’échapper du marquage de son geôlier argentin pour placer une tête sous la barre du légendaire portier stéphanois Ivan Curkovic. Le début du calvaire pour le gardien yougoslave et ses coéquipiers. Jusqu’ici auteurs d’un sans-faute en championnat (quatre matchs pour autant de victoires), les Verts sont totalement dépassés par la vitesse du jeu angevin. Insaisissable, Berdoll échappe sans cesse aux défenseurs stéphanois et inscrit trois nouveaux buts (un du droit, un du gauche et un deuxième de la tête!). Avec sa dégaine de rock star, le buteur angevin devient le nouveau chouchou de Jean Bouin … et tape dans l’oeil de Stéfan Kovacs ! Pour son premier match à la tête des Bleus une dizaine de jours plus tard, le nouveau sélectionneur appellera Berdoll, démontrant ainsi son envie de reconstruire l’équipe de France en s’appuyant sur de jeunes joueurs d’avenir. Poursuivant sur sa lancée, le jeune attaquant réalisera une saison de folie, terminant deuxième meilleur buteur du championnat juste derrière Carlos Bianchi (29 buts pour Berdoll, 30 pour Bianchi).
L’âge d’or du SCO
La démonstration angevine du 24 août 1973 n’est en rien un exploit isolé. Entre 1971 et 1974, l’ancien club de Raymond Kopa termine à trois reprises dans le top 5 de la Première Division. Cette régularité au plus haut niveau, elle la doit à une philosophie de jeu basée sur la technique et le mouvement symbolisée à la perfection par un homme : Jean-Marc Guillou. Associé à Albert Poli au milieu de terrain, Guillou est le véritable chef d’orchestre d’une équipe composée de joueurs talentueux tels que Jacky Lemée ou Eric Edwige, tous deux des solides références du championnat de France. Dribbleur incomparable et passeur d’exception, Guillou comble bonheur les Berdoll, Edwige et autres Bosko Antic qui sont tout heureux de convertir les offrandes de leur meneur de jeu. Elu joueur du siècle par les supporters angevins en 2009, Guillou n’obtiendra que tardivement la reconnaissance qu’il mérite en étant sélectionné pour la première fois en Bleus par Stefan Kovacs en 1974… à déjà 29 ans !
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