top of page

Les souvenirs de Pierre Chayriguès, chapitre 6

Cet été, Foot Universal vous propose de redécouvrir les souvenirs de Pierre Chayriguès parus en 1929 dans le journal L'Auto. Gardien de l'Equipe de France entre 1911 et 1925, Chayriguès fut le joueur français le plus populaire en son temps avant de faire polémique en devenant le premier international à avouer avoir été rémunéré tout au long de sa carrière.





Préambule de Foot Universal


Dans le dernier chapitre, Pierre Chayriguès nous racontait les premières approches d'un dénommé "Richard" du Red Star. Pour le convaincre de rejoindre le club audonien, ce dirigeant avait fait une offre claire à Pierre Chayriguès :s'il acceptait de venir, il serait payé pour jouer au football quand bien même le professionnalisme est alors interdit en France. Une offre difficilement refusable pour un jeune électricien de 19 ans


25 ans de Football par Pierre Chayriguès" Chapitre 6


Je suis "fait comme un rat !"


"Il (Richard) revint à la charge avec, cette fois , des offres plus précises, plus concrètes, plus sonnantes, si vous préférez. Des horizons nouveaux s'offrirent aussitôt devant moi et bon gré, mal gré, il fallut que je fisse des calculs.

Calculs à quoi ce tentateur de Richard m'aida en me montrant que mes gains d'ouvrier électricien seraient battus "les doigts dans le nez" par mes gains de joueur de football. Que voulez-vous que fissent mes dix-neuf ans contre Richard ?

Et le jour où je signais ma demande d'admission au Red Star, je touchais 500 francs. Oui ! Oui ! blaguez : devenir professionnel pour 500 francs ! D'abord c'étaient 500 francs-or. Et puis mes mensualités furent fixées à 400 francs, plus une prime de 50 francs par match gagné. Cela pouvait et devait représenter un peu plus de six milles francs par an !

Veuillez noter que nous sommes en 1912. Les recettes de l'époque sont très modestes; elles atteignent difficilement quelques billets de mille francs. Je sus bientôt que mon salaire et supérieur à presque tous les autres et si l'on tient compte de la dépréciation du franc qui frappe mes salaires d'après-guerre, c'est en 1912 que, somme toute, je fus le mieux payé.

Et je venais d'avoir vingt ans, peu après mon passage dans le professionnalisme .


D'ailleurs, Richard n'avait pas fait, lui non plus, une mauvaise affaire, car j'acquis bien vite, grâce à lui, une incontestable valeur publicitaire et les recettes du Red Star s'en ressentirent.

Une anecdote à ce sujet :

Richard fit, une fois annoncer que le dimanche suivant, dans la matinée, je devais participer l'après-midi ; on percevait, à l'entrée, la modique somme de 50 centimes. Or, il vint plus de 1500 personnes, Et Richard, de se frotter les mains !


Quelques grands matches


Me voici donc au Red Star et, bientôt en vedette. Tellement en vedette que la Ligue Parisienne de Football Association me sélectionna pour rencontrer Charentonneau l'équipe de Cologne.

Il faut vous dire que préalablement, les parisiens avaient été à Cologne prendre une "pipe" assez confortable avec 2 buts à 0. Il y avait donc une revanche à prendre et elle fut, d'ailleurs, éclatante, puisque nous gagnâmes par 5 buts à 1.

C'est même ce match gagné qui me valut, ô joie ! d'être proposé pour garder les buts de l'équipe de France à la place de Coulon dans la prochaine rencontre avec le Luxembourg.

C'est à Luxembourg, même, que je gagnais, par conséquent, mon premier galon international. Je ne portai pas malheur à mon équipe, puisque nous refilâmes du 4 à 1 aux compatriotes de Nicolas Frantz, vainqueur de deux tours de France cycliste.

Ah ! les beaux souvenirs de 1912 ! Et qui m'aurait dit que douze années encore, sauf les interruptions causées par des blessures, je devais rester portier de l'équipe de France ?

Puis, ce fut le match France-Belgique, disputé devant mon cher public parisien, celui de Saint-Ouen. Personne de nous n'escomptait la victoire, car la Belgique, après l'Angleterre, cela va sans dire, était notre plus redoutable adversaire. La France avait, d'ailleurs, perdu le match aller en Belgique.

Maës* commença par marquer un but pour la France. Quelle"rebecquetance !" Et nous vécûmes sur ce but presque toute la partie jusqu'au moment où une faute de main de Mesnier valut un penalty dont la petite nation amie et alliée profita pour s'offrir un but vers la fin.

Match nul !

A suivre...


* International Français, Eugène Maës connût une fin tragique. Au cours de la Seconde Guerre Mondiale, il fût dénoncé pour avoir tenu des propos anti-allemands et fût fusillé.


Sources


L'Auto, 13 mars 1929


45 vues0 commentaire
Ancre 1
bottom of page