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Dinamo Zagreb – Étoile Rouge de Belgrade 1990, le « coup d’envoi » de la guerre civile Yougoslave ?




Depuis la mort du maréchal Tito, son dirigeant entre 1945 et 1980, la république fédérale de Yougoslavie va mal. Composée de six républiques (Bosnie-Herzégovine, Croatie, Serbie, Slovénie, Macédoine, Monténégro) et de deux provinces autonomes (Kosovo et Voïvodine), la Yougoslavie est en proie à une montée du nationalisme dans l’ensemble de ses pays membres. En Serbie notamment, le président Slobodan Milosevic œuvre pour accroître la puissance de son pays au sein de la république Yougoslave. Ses manœuvres politiques pour prendre le contrôle de la république fédérale détériorent les relations entre les différents pays ; relations qui étaient déjà plus que fraîches depuis la disparition de Tito. Et dans ce contexte explosif, c’est un match de football qui va symboliser le déclenchement des hostilités.


Le 13 mai 1990, a lieu au stade Maksimir de Zagreb un match de championnat entre les deux plus grands clubs yougoslaves : les croates du Dinamo Zagreb et les serbes de l’Étoile Rouge de Belgrade. L’enjeu sportif est moindre puisque, à deux journées de la fin du championnat, l’Étoile Rouge est assurée de remporter le titre. En revanche, l’importance politique du match est tout autre. De chaque côté, les principaux groupes ultras sont gangrénés par le nationalisme. Alors quand les supporters des deux camps prennent la direction du stade ce jour-là, ils ne viennent pas les mains vides. Matraques, stock de pierres, barres de fer, acide pour dissoudre les grillages, chaque camp de supporters possède un véritable arsenal de combat et se prépare à l’affrontement.


Chez les Serbes, le tout est orchestré par Željko Ražnatović, plus connu sous le nom d’Arkan, chef de la principale milice aux ordres de Milosevic et leader des groupes de supporters de l’Étoile Rouge de Belgrade.

La rencontre étant télévisée, Arkan a tout intérêt à ce que celle-ci dégénère. En effet, l’objectif pour la Serbie de Milosevic est de remettre la faute des maux de la Yougoslavie sur les autres pays, et notamment la Croatie, son principal rival au sein de la fédération yougoslave. La retransmission du match à la télévision est importante car, bien utilisées, les images pourraient montrer que ce sont les supporters croates qui sont à l’origine des affrontements.


Dans ce contexte, le match n’aura jamais lieu. Au moment de l’échauffement des deux équipes, Arkan met son plan à exécution : ses hommes saccagent les tribunes du stade Maksimir et commencent à lancer des pierres sur les supporters du Dinamo qui ripostent. Dans cette atmosphère de chaos, la police intervient et la majorité des joueurs rentrent aux vestiaires tandis que les combats se poursuivent sur la pelouse. Mais comme l’armée, la police yougoslave a été largement infiltrée par les nationalistes serbes. En conséquence, les policiers qui étaient initialement chargés de faire tampon entre les deux camps, s’attaquent principalement aux supporters du Dinamo. Voyant, trois de ses supporters attaqués, la jeune star du Dinamo Zvonimir Boban assène un violent coup de pied à la tête d’un policier yougoslave.


Les images des affrontements de Maksimir et du coup de pied de Boban feront le tour du monde. Pourtant, il serait erroné de qualifier les événements de Maksimir comme étant le coup d’envoi de la guerre de Yougoslavie et ce pour deux raisons :

- les événements du 13 mai 1990 étant prémédités, ils s’inscrivent dans une logique de montée des tensions entre les deux camps.

- La guerre de Yougoslavie ne commencera que plus d’un an plus tard, faisant suite à la déclaration d’indépendance de la Croatie du 25 juin 1991.

En revanche, comme le souligne Loïc Tregourès dans son livre « Le football dans le chaos Yougoslave », les événements du stade Maksimir marquent « le coup de sifflet final de la République fédérale de Yougoslavie ». En effet, c’est bel et bien ce jour-là que les yougoslaves et l’ensemble de la communauté mondiale prirent conscience que l’implosion de la Yougoslavie était inéluctable. Quant à Zvonimir Boban, il deviendra un véritable héros national en Croatie à la suite des incidents du 13 mai . Fort heureusement il fera par la suite briller son jeu de pieds d’une bien plus belle manière en devenant un joueur majeur du grand Milan AC des années 1990.


A lire sur le sujet :

- RIVA G., Le dernier pénalty. Histoire de football et de guerre. Seuil, 2016.

- TREGOURES L., Le football dans le chaos yougoslave. Non lieu éditions, 2019.

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