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Quand la tactique devient un art : l’histoire du WM d’Herbert Chapman.



Passing et dribbling


Au temps des pionniers, le football était loin d’être le sport organisé tel qu’on le connait aujourd’hui. Dans les premières années, les joueurs pratiquaient le dribbling, c’est-à-dire que les matchs consistaient en de longues percées individuelles stoppées par des interventions rugueuses. Aujourd’hui, hormis dans quelques clubs de districts où l’on retrouve les derniers adeptes du dribbling, (vous savez, ceux qui agrémentent chacune de leurs touches de balle par un « ich, ich ») les joueurs de football pratiquent ce qu’on appelle le passing, à savoir un jeu composé de passes qui ont pour but de percer les lignes adverses.

Démocratisé dans les années 1880, le passing est la première grande innovation dans la façon de jouer au football. Avec le passing, un semblant de tactique commence à se mettre en place mais les schémas de jeu sont encore très primitifs : la plupart du temps, les équipes évoluent en 2-2-6 ou en 2-3-2-3, soit des tactiques totalement déséquilibrées. Dès lors, il faudra attendre plus de quarante ans pour voir émerger un véritable schéma de jeu orchestré par un manager novateur : le WM d'Herbert Chapman, manager d’Arsenal entre 1925 et 1934.


Le jour où tout a basculé


Le WM de Chapman trouve son origine dans une terrible défaite 7-0 des Gunners à Newcastle en octobre 1925. Évoluant dans un 2-3-2-3 classique pour l’époque, les hommes de Chapman prennent l’eau de toute part. La raison des difficultés défensives rencontrées par Arsenal ce jour-là réside dans une modification des règles survenues quelques semaines auparavant : là où il fallait auparavant que trois joueurs adverses (gardien compris) soient derrière l’attaquant au moment de la passe pour que celui-ci ne soit pas hors-jeu, il n’en faut désormais plus que deux ce qui avantage considérablement l’attaque. Alors, après la défaite de Newcastle, Chapman discute avec son capitaine Charlie Buchan et tous deux se mettent d’accord pour essayer une nouvelle formation que quelques clubs comme Southampton commencent à adopter. Celle-ci a pour originalité de se composer de 3 défenseurs au lieu de 2, le 2-3-2-3 devenant ainsi un 3-2-2-3 que l’on connaîtra bientôt sous un nouveau nom : le WM.



En voilà une belle tactique !

Si les recherches les plus récentes remettent en cause l’invention même du WM par Chapman, toutes s’accordent pour dire que c’est bel et bien le manager d’Arsenal qui lui donna ses lettres de noblesse. En effet, en plus d’adopter un nouveau schéma tactique, Chapman donne des consignes précises à ses joueurs sur le rôle qu’ils doivent avoir sur le terrain. Ainsi, le WM est une tactique plutôt rigide où le marquage individuel est de mise, ce qui permet à l’équipe de gagner en solidité défensive. Grâce à son nouveau schéma, Arsenal va dominer le football anglais à partir des années 30, triomphant en Cup en 1930 et remportant le championnat en 1931, 1933 et 1934.


Gloire et déchéance du WM


Attribuant en grande partie les bons résultats d’Arsenal à l’utilisation du WM, de nombreuses équipes anglaises vont également l’adopter avant que celui-ci ne s’exporte à l’étranger. En France, le premier club à l’utiliser est le RC Paris ce qui n’a rien d’étonnant pour deux raisons : l’entraîneur du club francilien est l’anglais Georges Kimpton et les « pingouins » rencontrent Arsenal une fois par saison à partir de 1930. Devenu conseiller technique de l’équipe de France, Kimpton y introduit également le WM mais cette fois, cela suscite de nombreux débats. En 1935, les défaites face à la Suisse et à la Suède sont, pour les anti-WM, la démonstration que ce schéma rigide ne convient pas avec la traditionnelle créativité française ! C’est bien simple, jamais depuis une tactique n’a été autant sujette à controverses (hormis peut-être le fameux 3-5-2 du PSG de Laurent Blanc face à Manchester City en 2016).


Définitivement adopté par l’ensemble des grandes équipes, le WM va rester la tactique dominante jusqu'au fameux Angleterre - Hongrie du 25 novembre 1953. Ce jour-là, Puskas et les siens humilient les anglais 6 à 3 à Wembley grâce à un 4-2-4 ultra-offensif qui déroute la tactique rigide de l'Angleterre. Désormais, c'est le 4-2-4 hongrois qui sera copié, notamment par le Brésil lors du mondial 1958. Toutefois, le WM ne disparaîtra pas totalement puisqu’il va inspirer le catenaccio, système tactique qui dominera le football italien pendant de très longues années.

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