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Tableau Noir : Le Wunderteam des années 30

Dernière mise à jour : 2 févr. 2022

Comment jouait le mythique Wunderteam, surnom donné à la sélection autrichienne des années 30 ? Voici la question à laquelle nous allons tenter de répondre aujourd'hui pour inaugurer le "Tableau Noir" notre nouvelle rubrique consacrée au style de jeu des plus grandes équipes de l'histoire.


Le Wunderteam au début des années 30

Préambule


Au tout début des années 30, la sélection autrichienne dirigée par Hugo Meisl émerveille le monde par son style de jeu révolutionnaire. Ecrasant un à un ses adversaires, le onze du pays de Mozart gagne très vite un surnom qu'il conservera pour l'éternité : le Wunderteam (équipe merveilleuse). Mais tactiquement parlant, comment évoluait cette équipe de légende ? Quels étaient ses forces, ses points faibles ? Difficile d'y répondre tant le nombre d'images d'elle en action parvenues jusqu'à nous est faible. Pourtant, grâce à la lecture de la presse de l'époque et aux quelques vidéos existantes, il est possible de se faire une idée du style de jeu de la sélection d'Hugo Meisl. Et le moins que l'on puisse dire est que celui-ci était révolutionnaire... (pour en savoir plus au sujet de l'histoire du Wunderteam, retrouvez l'article que nous lui avons consacré ici).


Schéma tactique et présentation des joueurs

Composition du Wunderteam lors de son match mythique face à l'Angleterre le 7 décembre 1932. Les remplaçants sont d'autres joueurs ayant joué un rôle majeur au sein de cette équipe entre 1930 et 1938

Schéma et joueurs majeurs


La composition présentée est celle alignée par Hugo Meisl lors du match Angleterre - Autriche du 7 décembre 1932. Bien que le match se soit soldé par une défaite 4-3, cette rencontre est souvent considérée comme la plus belle disputée par le Wunderteam et son maître à jouer, Matthias Sindelar. En effet, à cette époque, l'Angleterre est encore la meilleure équipe du monde et n'a jamais été battue chez elle par une équipe "du Continent". Avant la rencontre, les observateurs estimaient d'ailleurs que les Anglais, chez eux, l'emporteraient par deux à trois buts d'écart...

Sur le papier, l'équipe d'Hugo Meisl évolue en un 2-3-5 assez classique pour l'époque, même si le WM (ou 3-2-5) est de plus en plus populaire. Parfaitement adapté au jeu offensif des autrichiens, ce schéma de jeu permet à Meisl d'aligner cinq éléments offensifs de tout premier ordre, Schall, Zischek, Gshweild, Vogl et Sindelar faisant partie des meilleurs attaquants de l'époque. Formidable buteur (26 buts en 27 sélections), Anton Schall est toutefois en perte de vitesse à partir de 1932-1933. Il perdra définitivement sa place après la Coupe du Monde 1934, supplanté par la montée en puissance du jeune Josef Bican. Grand espoir du football autrichien, le jeune Henri Hiltl est quant à lui perçu comme l'héritier de Sindelar mais son départ en France en 1935 l'écartera définitivement de la sélection. La ligne de demi du Wunderteam compte elle aussi au moins un joueur d'exception en la personne de Smistik. Capitaine de l'équipe, ce demi-centre d'expérience (27 ans en 1932) est l'homme de base du Wunderteam. Très athlétique (il mesure 1m83, ce qui est très grand pour l'époque), il est le meilleur récupérateur et le premier relanceur de l'équipe. Derrière en revanche, la défense composée de Karl Sesta et Karl Rainer est vieillissante et constitue sûrement le point faible d'une équipe orpheline de l'immense Joseph Blum, au crépuscule de sa carrière en 1932. Fort heureusement, le onze de Meisl compte dans ses rangs un des meilleurs gardiens de l'époque pour rattraper les quelques errements de ses défenseurs. Lancé en sélection à tout juste 20 ans, Rudi Hiden sauva à de nombreuses reprises le Wunderteam de situations désespérées grâce à ses réflexes hors du commun. La qualité de son jeu au pied fit également merveille dans une équipe entièrement tournée vers la possession du ballon.


Philosophie de jeu


"Personnellement, j'ai la conviction profonde que jamais on n'a aussi bien joué et que peut-être jamais on ne jouera aussi bien que l'a fait le Wunderteam dans ses jours d'inspirations". Ces mots sont ceux de Pierre Gosset, l'un des rares journalistes français ayant eu la chance de voir l'équipe d'Hugo Meisl dans ses œuvres. Mais comment jouait-il ce fameux Wunderteam ? Pour l'époque, de façon tout à fait révolutionnaire. Tout d'abord, à une époque où les équipes de football étaient composées de lignes bien distinctes et où le fameux "dépassement de fonction" n'existe pratiquement pas, le onze autrichien de Meisl fait figure d'exception. Formée autour d'un groupe d'une petite quinzaine de joueurs, la sélection autrichienne possède des automatismes que l'on ne retrouve d'habitude que dans les clubs. Ainsi, ces automatismes permettent une synchronisation parfaite et la création d'un véritable bloc équipe. Les demi-centres excentrés que sont Walter Nausch et Karl Gall (ou Georg Braun) en sont l'illustration parfaite. Bien qu'initialement affectés à un rôle plus défensif, ils n'hésitent pas à se projeter vers l'avant. Contre l'Angleterre, Walter Nausch est d'ailleurs tout proche d'inscrire un but merveilleux à l'issue d'une belle percée.

Toutefois, ce qui caractérise le plus le Wunderteam est la volonté d'Hugo Meisl d'instaurer un véritable jeu de possession. Inspiré par l'Anglais Jimmy Hogan qui l'assiste dans sa tâche, le sélectionneur autrichien est un précurseur dans ce domaine.

Dotés de qualités techniques hors-paires, les autrichiens sont adeptes des redoublements de passes dans les pieds, chose tout à fait exceptionnel à l'époque. Ce style de jeu, lointain ancêtre du tiki-taka, repose pour beaucoup sur un homme : Matthias Sindelar. S'il est souvent à la conclusion des actions, "l'homme de papier" est le meneur de jeu de cette équipe. Avec son mètre 60 et son physique frêle, l'idole du peuple autrichien aurait pu souffrir à une époque où les joueurs n'étaient que très peu protégés par les arbitres. Toutefois, avec sa science du dribble et sa capacité à se déplacer entre les lignes, Sindelar est un véritable poison pour des adversaires pratiquant bien souvent le marquage individuel. Capable de dézoner, de dribbler, de marquer, de délivrer des passes décisives, il est considéré par le journaliste français Jean Eskenazi comme "le stratège le plus formidable qui ait jamais opéré sur un terrain de football". Avec Sindelar qui a tendance à souvent décrocher, les inters (Schhall et Gschweidl) et ailiers du Wunderteam ont tout le loisir de plonger dans son dos pour être à la conclusion des actions. En somme, l'équipe autrichienne se distingue des autres par un mouvement perpétuel et une facilité à se démarquer ultra-efficaces face à des défenseurs souvent meilleurs dans les duels que dans la lecture du jeu.


Quelques grands matchs du Wunderteam


Autriche 5 - 0 Ecosse (Schall, Zischek X2, Vogl, Sindelar) Vienne, 16 mai 1931


Allemagne 0 - 6 Autriche (Schall X3, Vogl, Zischek, Gschweidl) Berlin, 24 mai 1931


Autriche 2 - 1 Italie (Sindelar X2 pour l'Autriche, Meazza pour l'Italie) Vienne, 20 mars 1932


Angleterre 4-3 Autriche (Hampson X2, Houghton, Crooks pour l'Angleterre, Zischek X2, Sindelar pour l'Autriche) Londres, 7 décembre 1932


France 0 - 4 Autriche (Sindelar, Zischek, Weselik, Vogl) Paris, 12 février 1933








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